mercredi 19 septembre 2012

10.999 millions de lucides sur 11 millions


Je l’avoue, la curiosité m’a poussé à aller entendre et voir cette nymphette québécoise qu’on annonce comme étant le nouveau buzz des derniers jours et qui semble si virale sur You Tube (qu’on peut voir en cliquant ici).


Après coup, le seul virus dont je sois atteint est l’ennuie (baille). Je me range donc derrière les 10.999 millions de personnes potentielles qui trouvent probablement cette réédition d’un tube déjà insipide à l’origine comme un bonbon déjà fondu d’avance. Vous vous rappelez les bonbons Fizz? Ceux qui pétillent dans la bouche le temps d’une ou 2 seconde? Aucun plaisir réel, aucune valeur ajoutée si ce n’est qu’un picotement. J’admets tout de même que le producteur de ce « cover » a permis d’élever un peu le talent déjà faible de cette chanteuse qui ne passera jamais dans l’histoire de la musique, sauf peut-être dans les palmarès insignifiant du nombre de clics de souris servant seulement à alimenter la procrastination (comme pour moi, je l’admet). Pas très édifiant comme palmarès. Alors pourquoi cette envie folle de cliquer?

En fait, au-delà de cette mode du clip viral sur les réseaux sociaux, ce qui nous manque et qui se perd est le discernement, autant du côté spectateur que diffuseur. Avons-nous perdu tout sens du bon goût depuis que l'offre a explosé sur internet? Le narcissisme est-il devenu un standard en ce bas monde? Pour ma part, avec la surexposition du SOI et la haute proportion de « junk »exposée partout sur la planète numérique, il me semble même que je perd cette faculté de juger si chère à Emmanuel Kant et qui nous permet de définir ce qu’est le beau, le vrai. Je suis atteint aussi.

Toutefois, si l’on regarde le bon côté des choses, c’est justement cette faculté de juger qui est mise au défi en cette ère où tout est permis et où la liberté d’expression semble atteindre sa limite. On peut le remarquer par exemple avec le navet filmique anti-islamiste ou même Charlie Hebdo qui provoquent l’ire de la communauté en général sur la planète. Il est juste de se demander si cette vidéo et ces apparitions d’un Mahomet caricaturé propulsée par les réseaux sociaux ne sont finalement que des catalyseurs de ce qui veille de plus sournois en nous (que ce soit voyeurisme, violence, provocation ou haine). N’est-ce pas aujourd’hui une belle occasion de se demander s’il est nécessaire de s’exposer constamment aux seins de Princess Kate et autres « Occupation Double » ou à la rhétorique du « c’est nous la vérité, pas vous »? La nature même de ces diffusions à l’emporte-pièce ne fait que stimuler une forme d’abrutissement collectif qu’il est difficile de freiner. Nous l’avons bien vu dans les dérapages autant virtuels que dans la rue lors du « printemps érable ». Aurions-nous perdu tout sens de ce qu’est la créativité? Cette créativité qui nous permet d’évoluer? Oui, Internet a changé la face du monde. Ça c’était créatif! Mais ce que l’homme en fait, au même titre que la bombe atomique, n’a rien de rassurant. Quand le plus bas dénominateur commun domine autant dans les média que dans nos discussions de salons, il est temps de se demander si nous valons mieux individuellement… pour le mieux être collectif.



mercredi 12 septembre 2012

Nous aussi on est Super Ordinaire...


J’aime parfois qu’on me force à faire quelque chose. Ça fait du bien de se faire diriger de temps à autre. Il m’arrive d’être contraint à réfléchir quand je ne suis pas assez fort pour changer une habitude bien « croutée » en moi. Je remercie donc formellement les pétrolières d’éveiller les consciences, malgré eux. En fait, la montée du prix de l’essence me fait sourire et m’enchante même. Bon. Mon sourire est un peu jaune parce que je consomme beaucoup d’essence. Mais cette fulgurante montée du prix à la pompe impose la réflexion sur notre relation avec l’essence et nos habitudes de vie qui l’alimente. Restons encore un peu dans les couleurs si vous le voulez bien.



Du plus loin que je me souvienne, la seule différence entre nos habitudes de consommation d’il y a trente ans et celle d’aujourd’hui face à l’essence est le choix de couleur. J’entends encore mon père dire au pompiste : « 10 piasses de jaune steplait ». Et moi qui aimais bien plus la couleur rouge, je me demandais bien pourquoi personne n’en voulait, sauf peut-être les grands-pères avec leurs gros Chrysler… Pour le reste, nous sommes toujours et encore plus accros à l’essence. Nous avons évolué, mais dans le mauvais sens! Nous restons toujours plus loin en banlieue, nos petits déplacements se font en voiture faute de temps, nous avons de gros bateaux, des jets skis et des pickups pour les vrais gars (et parfois de très petites madames).  Preuve du culte transposé du char: y’en a qui posent des couilles en arrière de leur voiture, probablement pour compenser quelque chose… De plus, je n’ai jamais vu autant de camions-remorque sur la route grâce à nos besoins de consommation qui n’ont maintenant plus aucune limite. Si au moins on pouvait sniffer ce gaz sans danger, question d’avoir toujours le sourire aux lèvres…


Que nenni! Dans un geste qui s’apparente à l’injection de drogue dure, nous insérons allègrement ce fluide dans cette extension de nous-mêmes qu’est l’auto. La voiture est devenue une dépendance presque physique… viscérale même. Donc, en 30 ans, aucune solution, aucune créativité, aucun espoir de s’en sortir à court terme. Pourtant, après la crise de l’énergie des années 70, nous aurions dû apprendre quelque chose? Ah? L’apprentissage de l’histoire sert à rien vous dites? Et les vaches pètent, et les porcs défèquent? Ah, ok…


À partir de maintenant, cessez d’engorger l’autoroute médiatique de vos boniments ou complaintes envers les pétrolières. Les gouvernements sont impuissants? Pourquoi ne pas attaquer le problème sous un autre angle? Au lieu de proposer aux gouvernements de surveiller ces capitalistes crasse ces crosseurs ces entrepreneurs, pourquoi ne pas imposer à l’Assnat de bonifier substantiellement l’offre de transport en commun et de faire la promotion d’alternatives écologiques au lieu de modèles d’échangeurs des années 60? Pourquoi ne pennons-nous pas un instant, durant un commercial passant au milieu d’Occupation Double pour nous demander ce que nous faisons à une distance d’une heure de notre travail? Et durant les nombreuses annonces à Radio X, pourquoi ne pas demander aux constructeurs automobiles, par les voix officielles, de s’imposer des normes beaucoup plus sévères face à la consommation d’essence de leurs véhicules? Et si c’était le fun de partager mon déplacement avec quelqu’un d’autre au lieu d’écouter seul CKAC Radio-Trafic?


Il serait facile de prétendre que la psychose de l’augmentation passée, nous reprendrons notre trou comme un bon chien de poche et finiront par accepter que l’essence s’élève à 1,60$ rendu à noël. Mais il est plus que temps de collectivement s’encourager à adopter des solutions alternatives, quitte à juste lever le pied un peu. Et si nous vivions mieux collectivement sans l’essence justement? Voici quelques pistes de solutions farfelues en attendant vos solutions plus réalistes :


• Démarrer un concours du plus grand nombre de personnes dans une seule voiture pour le même déplacement sur plusieurs jours de suite


• Imposer une loi qui empêche les gens d’aller travailler à plus de 20 km de la maison (le fédéral en serait bien capable…)


• Interdire les voitures qui tournent au ralenti l’hiver ou à l’arrêt plus de 30 secondes


• Interdire les démarreurs à distance


• Donner un bonus aux employés qui arrivent en covoiturage ou en transport en commun à la fin de l’année (financé par le gouvernement bien sûr)


• Installer le wi-fi dans tous les trains de banlieue et les autobus voyageurs


• D’autres idées?

mercredi 11 juillet 2012

L'art public en banlieue

Une sobre réflexion signée Sébastien Roy ©



La question de l’art public en banlieue m’interpelle. Quelle place lui donne-t-on? L’art public est-il assez présent dans nos villes? Quel apport cette forme d’art donne-t-elle aux citoyens et quelle est son influence sur l’image d’une ville?

Loin de vouloir faire du journalisme, l’idée d’écrire une réflexion sur le sujet de l’art public m’est venue en lisant les procès-verbaux de la ville de Vaudreuil-Dorion. Le lien ci-dessous fait foi de la volonté (obligation) de la ville à ce sujet (voir articles 11-11-1071 et 1072).


Et je me suis demandé principalement si les artistes désignés pour développer une œuvre publique commandée par une municipalité ou un organisme privé ont une liberté de création assez grande (d’où l’image de l’en-tête). Est-ce que l’art public que s’offrent les citoyens est assez représentatif et pertinent pour eux et valorisant pour l’artiste lui-même? L’art public est-il tenu trop fort en laisse?



L’œuvre ci-haut serait, selon le procès-verbal, la création de l’artiste Michel Goulet créée au montant de 69000$. L’analyse de l’investissement ne fait pas partie de mes préoccupations. Toutefois, je constate que cette œuvre publique ne comporte aucune notice ou description, aucun titre et mentions de l’auteur, ni près de l’installation, ni sur un site web. Or, comment pleinement estimer la valeur artistique et le message (s’il y en a un) ainsi que le concept? Normalement, il est intéressant de comprendre la démarche derrière une œuvre publique pour profiter de son apport. Toutefois, cette dernière semble surtout remplir certains critères compensatoires architecturaux vu la grande sobriété de l’aréna qui l’accueille. À tout le moins, elle permet au public une forme de réflexion sur sa signification. Tout n’est pas perdu.

Art véritable ou art influencé?

Il serait en effet utopique de croire que la création d’une œuvre publique soit exempte de l’influence externe. On parle tout de même d’une commande. Ce genre d’œuvre d’art financé par le public n’est pas libre de toutes contraintes. Des contraintes d’espace, d’argent et de matériaux doivent être considérées, tout en préservant l’effet escompté. Par définition, l'art public doit être visible par le plus grand nombre. Mais il doit surtout créer une surprise chez le citoyen et provoquer un sentiment de contraste ou de complétion avec l’architecture du bâtiment ou du lieu qui accueille l'objet.

Mais, est-ce que l’influence « artistique » de la ville ou de la firme de surveillance des travaux sur l’œuvre à développer diminue sa valeur réelle comme art? C’est possible. Mais pour y répondre, il faut minimalement accompagner l’installation d’une description de l’objet et évoquer la démarche artistique derrière l’œuvre. Et comme citoyen, je veux pleinement profiter de l’œuvre. Pour le moment, cet aspect explicatif est manquant pour les deux seules installation artistique permanente dans ma cité. Au final, pourrions-nous considérer que c’est l’aréna (ou le bâtiment) qui sert de support à l’œuvre, ou bien si l’œuvre ajoute quelque chose à l’aréna et à l’image de la ville? Probablement un peu des deux.

L’art public et le message véhiculé


L’autre « monument urbain » d’ampleur est situé dans un beau parc de la ville. Dans le cas suivant, on poursuit clairement un autre objectif. En premier lieu, on vient un peu déséquilibrer l’observateur avec une œuvre gigantesque postée dans un environnement normalement serein… tout en tentant de créer un sentiment d’appartenance quelconque avec le message. Notez les 3 petits cubes en bas à droite : Leur présence propose probablement au citoyen de compléter lui-même la réflexion sur ce qu’il est et sur sa propre place dans cette ville (de plus, les enfants s’amusent beaucoup avec les cubes…). On se rapproche donc lentement d’une œuvre plus interactive. Et un document de la ville sur son site web viens donner un éclairage très intéressant sur le concept. http://www.ville.vaudreuil-dorion.qc.ca/documents/pdf/services/Arts%20et%20culture/DescriptionConceptJesuis.pdf


Mis à part les œuvres patrimoniales dont la mise en valeur était prioritaire dans la précédente décennie, retrouve-t-on la même présence d’œuvres modernes dans les autres villes du même type que Vaudreuil-Dorion, ou bien sommes-nous des précurseurs dans la couronne de Montréal? Or, la ville a récemment enregistré une commande pour deux sculptures pour le nouveau (et énorme) centre multisport. Ce projet revient à madame Rose-Marie E-Goulet pour 136000 dollars; celle-là même qui a concocté quelques œuvres pour des parcs de Montréal.

Devrions-nous en rester là? Pourquoi ne pas étendre l’obligation de l’implantation d’œuvres publiques au domaine privé et industriel? N’y a-t-il pas plus monotone qu’un parc industriel? Le mécénat aurait-il aussi perdu toute noblesse à la chambre de commerce? Il y a pourtant de l’espoir en institution privée. En effet, un rare, mais bel exemple se trouve actuellement à Rigaud : le collège Bourget inaugurait récemment une œuvre d’art avec tout le décorum nécessaire. http://www.journalpremiereedition.com/Culture/2012-06-29/article-3020341/Inauguration-d%26rsquoune-%26oeliguvre-d%26rsquoart/1.

« Mais qu’est-ce que ça m’apporte? »

On peut entendre parfois ce genre de commentaire, qui est au fond légitime pour tous payeurs de taxes. Au-delà de la valeur artistique de l’œuvre « sans nom » de l’aréna ou du monument « Je Suis » du parc Valois, il y a l’apport pour la population. Est-elle seulement consciente de cet apport? Le problème avec l’œuvre de l’aréna est le manque d’interactivité avec les usagers. Non pas dans le sens technologique du terme (comme pour un téléphone intelligent), mais au sens « appropriation » et « échange » avec celui qui la côtoie. Que ce soit au niveau intellectuel ou même physique, une œuvre publique ne devrait pas seulement servir à embellir un endroit austère. Pour qu’une œuvre soit pleinement publique, il faut que le citoyen y trouve son compte et puisse s’approprier l’œuvre. Les bancs publics dans l’ombre de l’installation permettent de s’arrêter un moment pour observer, mais dans ce cas-ci, j’ai bien peur que ces bancs ne soient que peu utilisés. Il est utile de savoir que l’œuvre est tout de même en plein cœur d’un stationnement… En contrepartie, je pense que la grande structure « Je suis » mentionnée plus haut remplit bien un rôle d’échange avec le citoyen, ayant même déjà servi pour une manifestation. On a utilisé l’œuvre à des fins de de communication! http://www.journalletoile.com/Actualites/Municipalites/2012-06-05/article-2996657/Je-suis%26hellip-congedie!/1.

Il n’est probablement pas facile de mettre en application la loi du 1% sur les œuvres d’art en milieu publique, tout en donnant un aspect plus léger à des architectures souvent « rigides ». Cette dimension est importante à cause de l’effet qu’une œuvre crée chez l’usager du lieu qu’il fréquente (i.e. admiration, questionnement, dégoût, prise de position, réflexion).

Or, malgré l’amas de couleur et de métal que représente l’installation de l’aréna, sa mise en valeur par la ville de Vaudreuil-Dorion laisse perplexe. Cette œuvre deviendra-t-elle invisible après quelque temps? On peut imaginer qu’elle comblera les besoins en photomarketing pour les divers organismes empruntant les locaux de l’aréna, mais est-ce que le simple citoyen pourra en profiter pour augmenter sa pensée critique, sa perception de l’image de sa ville et l’identification à son milieu avec cette œuvre? Jusqu’à maintenant, il n’est pas évident que la ville ait considéré une forme de continuité conceptuelle, un thème pour ses œuvres publiques. Attendons la divulgation des sculptures de madame E-Goulet pour confirmer cet aspect.

Et de votre côté?

Sans la loi du 1%, je doute que nous ayons le plaisir de profiter de cette forme d’art accessible pour tous, peu importe sa signification artistique ou sa pertinence. Et de votre côté? En avez-vous des œuvres publiques (ou même urbaines) dans votre banlieue ou dans votre quartier? Qu’est-ce que cela vous apporte? Partagez-moi vos photos et commentaires. Je tâcherai de monter un album sur Facebook pour les partager.

En complément, voyez la politique gouvernementale sur l’art public : http://www.mcccf.gouv.qc.ca/index.php?id=59


Et une analyse de 2008 de L’UdM à ce sujet : http://www.artpourtous.umontreal.ca/decouvrir/politique.html