lundi 10 mars 2008

Le projet de loi C-10, de kessé?


Cette question pourrait vraisemblablement venir d’un simple député du parlement fédéral. Elle est légitime et compréhensible. Jetez un coup d’œil sur les amendements de ce bourbier administratif et votre cerveau se mettra à halluciner devant autant de charabia.

Pas surprenant que les députés en chambre n’aient pas vu passer sous leur nez la minuscule clause de censure qui y est incluse. En effet, cette clause permet à Patrimoine Canada et à l’honorable pantin Josée Verner et à sa sous-fifre, Annette Gibons, de jeter un œil critique sur les créations cinématographiques futures. Les conservateurs veulent se permettre remontrances et refus de subventions, dans le cas où ces mêmes œuvres sortent du cadre rétrograde conservateur. Ils n’auront jamais aussi bien porté leur nom de parti politique. Lisez seulement ce que madame Gibbons à dit récemment sur le fonctionnement d’une telle censure (et ne me dites pas que je la cite hors contexte…) :

« La censure, c'est quand on dit qu'une production ne peut pas être montrée au public. Ce n'est pas ce qu'on fait. On dit que l'on ne veut pas financer certaines choses qui pourront être réalisées [sans subventions]. Le rôle de l'État est de bien gérer les fonds publics. »

Dans le contexte où nos amis américains contrôlent la majeure partie de notre culture cinématographique, comment une telle déclaration peut-elle être faite? Ainsi, aucune création artistique ne peut survivre sans subvention fédérale. On constate immédiatement que le ministère essaie de camoufler son utilisation du mot « censure ».

En voici une autre pour votre plaisir:

Mme Gibbons soutient que le jugement visant à déterminer si une production doit être privée de deniers publics en raison de scènes sexuellement explicites, de violence excessive ou de la propagande haineuse serait laissé à la discrétion d'un fonctionnaire.
(Les précédents extraits proviennent du site web de Radio-Canada)

Je conviens que cette clause peut servir à empêcher les créateurs de films à caractère haineux, ou avec un propos pédophile ou raciste de passer à travers les maillons de Téléfilm Canada. Mais l’autre côté de la médaille ouvre la porte à une trop grande ingérence d’un ministère totalement inapte en matière d’ordre publique. C’est justement parce qu’il n’y a aucun cadre défini sur les critères de sélection que toutes nos forces de contestations devraient se soulever contre cette clause de la loi C-10.

Ainsi, grâce à la pression de groupuscules religieux obscurs et passéistes canadiens, le gouvernement conservateur se donne le droit de remplacer papa-maman sur ce que nous devrions ou ne devrions pas regarder. Quel message le gouvernement fédéral envoie-t-il au peuple ? Un message de déresponsabilisation face à ce qui est bon ou non au niveau de l’art cinématographique et télévisuel. Encore une fois, nous pouvons dormir tranquille, Harper et son amiral Stockwell Day veillent sur nos mœurs. George Orwell doit se bidonner dans sa tombe…
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Ce nouvel épisode sombre de la politique fédérale nous a aussi offert un délicieux moment de lucidité de Gilles Duceppe en début de semaine. En effet, il a dû mentionner aux médias que notre seul espoir envers une modification de la clause de censure tient dans un possible refus du Sénat de l’approuver. C’est le monde à l’envers; le Bloc Québécois qui s’en remet au Sénat… Monsieur Duceppe, si vos députés et avocats avaient fait correctement leur travail au lieu d’essayer de renverser les Libéraux à tout prix, nous n’en serions pas à chialer dans le vide (NOTE : C’était les Libéraux qui étaient au pouvoir au moment de la présentation du projet de loi C- 10)

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L’image de censure provient de Eric Drooker

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